đąïž Les ravages de Perenco, le "petit frĂšre" inconnu de Total #22
Il y a un an, pendant que le ministre de l'Intérieur se lùchait sur les manifestants de Sainte-Soline, un consortium de journalistes révélait la face sombre du n°2 de l'industrie pétroliÚre en France, la société Perenco.
Nous voilĂ de retour. Nous, car Ă partir de maintenant, il n'y a plus une seule personne derriĂšre cette newsletter mais bien trois ! CĂ©cile Massin, journaliste indĂ©pendante, et Simon Gleize, expert du marketing et du SEO des mĂ©dias, ont rejoint l'Ă©quipe ! Cette collaboration devrait nous permettre d'ĂȘtre beaucoup plus rĂ©guliers et surtout de construire durablement le mĂ©dia. Nous avons lancĂ© de nombreux chantiers. Nous sommes en train de rĂ©flĂ©chir au meilleur statut pour le mĂ©dia, de consolider sa proposition Ă©ditoriale et ses sources de financement... Bref, ça charbonne ! Pour celles et ceux qui voudraient en savoir plus sur le dĂ©veloppement du projet, rendez-vous Ă la fin de la newsletter.
Mais place Ă l'actualitĂ©. Il y a un an, pendant que le ministre de l'IntĂ©rieur se lĂąchait sur les manifestants de Sainte-Soline, un consortium de journalistes rĂ©vĂ©lait la face sombre du n°2 de l'industrie pĂ©troliĂšre en France, la sociĂ©tĂ© Perenco. Nous revenons en dĂ©tails sur les impacts de cette enquĂȘte et vous proposons de dĂ©couvrir les coulisses avec leurs auteur·rices.
Rembobine est un jeune mĂ©dia indĂ©pendant. Il ne vit que grĂące Ă vos partages et vos retours. N'hĂ©sitez pas Ă partager ce mail Ă vos ami·es, vous ĂȘtes les meilleur·es ambassadeur·rices đ
NĂ© d'ateliers d'Ă©ducation aux mĂ©dias oĂč l'on disait « les journalistes en font des caisses sur un sujet, et la semaine d'aprĂšs, on n'en parle plus », Rembobine tente de montrer que le journalisme peut avoir de l'impact sur la sociĂ©tĂ©.
đż De quoi parlait-on il y a un an ?
Quelle Ă©tait l'actualitĂ© il y a un an ? Ătait-ce un feu de paille ou au contraire un battement d'aile de papillon qui a dĂ©clenchĂ© une tornade ?
đ„ Espoir â Le 30 octobre, Luiz Inacio Lula da Silva remporte avec 50,9 % des votes l'Ă©lection prĂ©sidentielle au BrĂ©sil face au prĂ©sident sortant d'extrĂȘme droite, Jair Bolsonaro. Un an aprĂšs, les voyants passent progressivement au vert en matiĂšre Ă©conomique, politique, internationale ou environnementale selon l'AFP.
✠Ballon rond â Elle n'a pas encore commencĂ© que l'organisation de la coupe du monde au Qatar fait scandale. Nous vous avions concoctĂ© un thread Twitter avec toutes les enquĂȘtes pointant la catastrophe environnementale et les atteintes aux droits humains. Un an plus tard, on apprend que l'Arabie Saoudite est la seule candidate au mondial 2034...
đłïž Sauvetage â AprĂšs trois semaines bloquĂ© en mer, l'Ocean Viking, bateau de SOS MĂ©diterranĂ©e accoste Ă Toulon avec 231 rĂ©fugiĂ©s Ă son bord. Une crise diplomatique franco-italienne. Aujourd'hui, alors que le navire continue sa mission humanitaire, lâItalie a rĂ©cemment adoptĂ© un dĂ©cret qui complique les activitĂ©s des navires dâONG. Ils doivent dĂ©sormais transporter les personnes secourues vers un port dĂšs la premiĂšre intervention, les empĂȘchant dâenchaĂźner les sauvetages.
Le moulin Ă paroles đ€
Une déclaration qui a pris trop de place dans l'espace médiatique
đźââïž Le ministre de lâIntĂ©rieur, GĂ©rald Darmanin, a estimĂ© le dimanche 30 octobre 2022 que les manifestations contre les bassines de Sainte-Soline (Deux-SĂšvres) relevaient de "lâĂ©coterrorisme". Un terme qui nâa pas manquĂ© de faire rĂ©agir dans les sphĂšres politiques, militantes et mĂ©diatiques.
Le concept a Ă©mergĂ© aux Etats-Unis au dĂ©but des annĂ©es 2000. En 2021, l'Ăcole nationale supĂ©rieure de la police se vantait dĂ©jĂ d'expliquer "l'Ă©coterrorisme aux futurs lieutenants de police". Ce qui est plus original, c'est un ministre qui l'utilise. En faisant cela, Gerald Darmanin ne cherche pas Ă dĂ©crire une rĂ©alitĂ©, mais bien Ă dĂ©politiser lâaction des militants et Ă la criminaliser en installant cette idĂ©e dans le dĂ©bat public. Cette stratĂ©gie a Ă©tĂ© dĂ©cryptĂ©e par de nombreux mĂ©dias et chroniqueurs, notamment ClĂ©ment Viktorovitch. Le patron de la DGSI, Guillaume Lerner, a lui-mĂȘme rĂ©cusĂ© le terme en juillet 2023, expliquant quâ« aucune action » de nature terroriste nâa Ă©tĂ© commise au nom de la cause environnementale ces derniĂšres annĂ©es.
Et aprĂšs ? âïž
Le 28 mars dernier, Ă l'AssemblĂ©e nationale, le ministre de lâIntĂ©rieur a annoncĂ© la dissolution de l'association Les SoulĂšvements de la Terre, auquel il impute l'organisation et les dĂ©bordements de la manifestation Ă Sainte-Soline. Il a ensuite prĂ©sentĂ© le 21 juin en Conseil des ministres le dĂ©cret pour la rendre effective sans cependant faire mention d'"Ă©coterrorisme" mais en mentionnant des "sabotages et dĂ©gradations matĂ©rielles, y compris par la violence". De nombreuses personnalitĂ©s et associations se sont mobilisĂ©es pour dĂ©noncer une atteinte grave Ă la libertĂ© d'association. Le Conseil dâĂtat examinait, le vendredi 27 octobre dernier, la lĂ©galitĂ© de cette dissolution du mouvement Ă©cologiste. Finalement, le 9 novembre 2023, elle a dĂ©finitivement Ă©tĂ© annulĂ©e.
đ„ En quĂȘte d'impact
Scandale d'un jour ou impact pour toujours ?
Perenco files : révélations sur une compagnie pétroliÚre au-dessus des lois
Malgré le flux incessant de l'actualité, impossible d'ignorer les désastres que Total Energies, le géant pétrolier, provoque à travers le monde. Il en va autrement pour le groupe Perenco, bien moins connu du grand public.
Il gagnerait pourtant Ă l'ĂȘtre : le deuxiĂšme acteur du secteur en France, qui opĂšre dans quatorze pays et rĂ©alise plusieurs milliards de chiffre d'affaires est un trĂšs mauvais Ă©lĂšve avec son lot de catastrophes.
Atteintes Ă l'environnement, violations des droits humains ou encore dissimulation d'avoirs dans des paradis fiscaux font ainsi partie du tableau peu reluisant du groupe, fondĂ© dans les annĂ©es 1990 par Hubert Perrodo et aujourd'hui repris par son fils François. Si ces catastrophes n'avaient jamais intĂ©ressĂ© grand monde, c'est aussi que l'entreprise a toujours agi avec le maximum de discrĂ©tion. Toutes ces rĂ©vĂ©lations sont le fruit d'une Ă©norme enquĂȘte en plusieurs volets des journalistes de Disclose et Investigate Europe (IE).
En France, on découvre qu'AgnÚs Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, a dissimulé l'existence d'une société familiale liée à Perenco. Des cas de pollution imputables à Perenco émergent en République démocratique du Congo et au Gabon. Les journalistes d'investigation mettent également en lumiÚre un scandale financier lié à un gisement au Congo-Brazzaville, impliquant des membres de la famille présidentielle.
L'impact de l'enquĂȘte đŻ
Un an aprĂšs, Perenco continue-t-elle Ă agir en toute impunitĂ© ? La ministre de la Transition Ă©cologique a-t-elle dĂ» rendre des comptes ? Quelles ont Ă©tĂ© les rĂ©percussions de l'enquĂȘte dans les mĂ©dias ? Rembobine vous propose une visualisation de l'impact de l'enquĂȘte de Disclose et d'Investigate Europe.
Elle est inspirĂ©e de la mĂ©thodologie qu'a utilisĂ©e Disclose pour son rapport d'impact 2022. Rendez-vous sur le site pour comprendre ce qui peut ĂȘtre inclus dans ce tableau.
- Un dĂ©cret est paru le 15 novembre 2022 au Journal officiel empĂȘchant AgnĂšs Pannier-Runacher, ministre de la Transition Ă©cologique, de traiter des affaires en lien avec Perenco.
- La Haute AutoritĂ© pour la transparence de la vie publique (HATVP) a ouvert une enquĂȘte sur la ministre.
- En France, les reprises dans les mĂ©dias ont Ă©tĂ© nombreuses, notamment vis-Ă -vis des accusations de conflits d'intĂ©rĂȘts Ă l'encontre d'AgnĂšs Pannier-Runacher : Le Monde, LibĂ©ration, Les Echos, Marianne, BFMTV...
- Dans la lignĂ©e de l'enquĂȘte, d'autres papiers ont Ă©tĂ© publiĂ©s, montrant les ravages provoquĂ©s par Perenco dans d'autres pays que ceux traitĂ©s dans l'enquĂȘte de Disclose et Investigate Europe : le PĂ©rou (L'HumanitĂ©), le Guatemala et l'Equateur (Reporterre).
- Suite Ă la publication du volet de l'enquĂȘte sur le Congo-Brazzaville, Challenges a rĂ©vĂ©lĂ© que le Parquet national financier (PNF) avait ouvert plusieurs enquĂȘtes prĂ©liminaires Ă lâencontre de la multinationale franco-britannique, soupçonnĂ©e de corruption dâagents publics Ă©trangers dans certains pays africains oĂč elle opĂšre.
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