đ©ââïž Les jeunes obnubilĂ©s par la chirurgie esthĂ©tique #28
Cette semaine, on vous embarque Ă la dĂ©couverte d'une enquĂȘte parue il y a tout juste un an : le recours Ă la chirurgie esthĂ©tique chez les 18-34 ans.
Salut les Rembobineur·euses ! Avant de rentrer dans le vif du sujet, on voulait commencer par vous remercier : vous ĂȘtes de plus en plus nombreux·euses Ă nous lire et on s'en rĂ©jouit. Monter un mĂ©dia indĂ©pendant, c'est beaucoup (beaucoup) de travail et des rentrĂ©es d'argent qui ne font pas (encore) pĂąlir Bernard Arnault, mais c'est aussi et surtout Ă©normĂ©ment de plaisir Ă nous savoir lu·es, alors merci !
Cette semaine, on vous embarque Ă la dĂ©couverte d'une enquĂȘte parue il y a tout juste un an sur un sujet qui pourrait sembler de niche, mais qui ne l'est pas : le recours Ă la chirurgie esthĂ©tique chez les 18-34 ans. Ăcrite Ă quatre mains par les journalistes du Parisien Elsa Mari et Ariane Riou, cette enquĂȘte dĂ©cortique avec une trĂšs grande prĂ©cision pourquoi les actes de chirurgie esthĂ©tique ont explosĂ© chez les plus jeunes, mais aussi et surtout ce que cela dit de ce qu'elles ont appelĂ© la « gĂ©nĂ©ration bistouri ». Bonne lecture !
Rembobine est un jeune projet indĂ©pendant. Il ne vit que grĂące Ă vos partages et vos retours. NĂ© d'ateliers d'Ă©ducation aux mĂ©dias oĂč l'on disait « les journalistes en font des caisses sur un sujet, et la semaine d'aprĂšs, on en parle plus », il tente de montrer que le journalisme peut avoir de l'impact sur la sociĂ©tĂ©. N'hĂ©sitez pas Ă partager ce mail Ă vos ami·es, vous ĂȘtes les meilleur·es ambassadeur·drices đ
L'enquĂȘte : Les 18-34 ans, adeptes du bistouri
Il aura fallu pas moins d'un an d'enquĂȘte Ă Elsa Mari et Ariane Riou pour parvenir Ă la publication de leur passionnant livre GĂ©nĂ©ration Bistouri. EnquĂȘte sur les ravages de la chirurgie esthĂ©tique chez les jeunes aux Ă©ditions JC LattĂšs. A l'origine, les deux journalistes du Parisien sont parties d'un constat sans Ă©quivoque : depuis 2019, les 18-34 ans sont devenus plus nombreux que les 50-60 ans Ă avoir recours Ă la chirurgie esthĂ©tique. A travers le monde, 68% des rhinoplasties sont par exemple dĂ©sormais effectuĂ©es sur des 18-34 ans.
Leur livre-enquĂȘte est disponible dans toutes les bonnes librairies. L'Ă©diteur vous offre l'accĂšs aux "bonnes feuilles". Vous pouvez aussi Ă©couter les autrices dĂ©cortiquer le sujet Ă travers le podcast Code Source du Parisien.
DĂ©cidĂ©es à « prendre le pouls de la jeunesse » et Ă comprendre ce boom de la chirurgie esthĂ©tique chez les plus jeunes, les deux journalistes ont interviewĂ© plusieurs centaines de personnes sur une annĂ©e, parmi lesquelles des psychologues, des sociologues, des historien·nes. Les deux journalistes ont Ă©galement poussĂ© la porte de cabinets de chirurgie esthĂ©tique en France et rencontrĂ© des jeunes femmes ayant eu recours Ă la chirurgie esthĂ©tique. Elles ont Ă©galement effectuĂ© un pas de cĂŽtĂ© en allant en Turquie, oĂč les opĂ©rations sont moins chĂšres qu'en France et oĂč certains actes considĂ©rĂ©s comme illĂ©gaux ici sont pratiquĂ©s (Ă l'image des dents que certain·es jeunes se font limer alors qu'elles sont parfaitement saines pour pouvoir y poser des couronnes dentaires dans une perspective purement esthĂ©tique).
Des extraits du livre d'Elsa Mari et Ariane Riou sont dévoilés dans cet article du Parisien.
De la France Ă la Turquie, leur enquĂȘte tĂ©moigne avec brio de la banalisation des opĂ©rations de chirurgie esthĂ©tique. Loin des idĂ©es reçues, les deux journalistes montrent comment ces opĂ©rations touchent aujourd'hui tous les milieux sociaux pour des jeunes qui, expliquent les deux journalistes, poussent dĂ©sormais la porte des cabinets de chirurgie esthĂ©tique non pas pour gommer d'Ă©ventuels signes de vieillesse, mais pour les anticiper. Pour les 18-34 ans, l'objectif est Ă©galement de se conformer Ă la mode et Ă ce titre, les autrices rappellent sans surprise le rĂŽle majeur des rĂ©seaux sociaux, oĂč les utilisateurs sont assaillis d'images retouchĂ©es ou embellies grĂące Ă des filtres.
RĂ©solument ancrĂ©e dans une perspective de santĂ© publique, l'enquĂȘte d'Elsa Mari et Ariane Riou montre Ă©galement que ces opĂ©rations de chirurgie esthĂ©tique, bien que banalisĂ©es, ne sont pas sans risque. Sont notamment dĂ©voilĂ©s des tĂ©moignages de jeunes femmes qui se sont retrouvĂ©es mutilĂ©es Ă la suite d'injections effectuĂ©es hors de tout cadre lĂ©gal par des « fake injectors » (injectrices illĂ©gales). Au-delĂ des risques physiques, les deux autrices soulignent Ă©galement les impacts psychologiques que les opĂ©rations de chirurgie esthĂ©tique peuvent entraĂźner. Une enquĂȘte puissante sans ĂȘtre moralisatrice, dont on ne peut que vous conseiller la lecture.
đ„ En quĂȘte d'impact
Un an aprÚs la publication du livre d'Elsa Mari et Ariane Riou, des mesures ont-elles été prises pour sensibiliser les plus jeunes aux risques liés à la chirurgie esthétique ? Les « fake injectors » continuent-elles d'exercer ? Les médias se sont-ils emparés du sujet ?
Rembobine vous propose de dĂ©couvrir l'impact de l'enquĂȘte, d'aprĂšs une mĂ©thodologie inspirĂ©e du mĂ©dia d'investigation Disclose et de son rapport d'impact. Rendez-vous sur le site pour comprendre ce qui peut ĂȘtre inclus dans ce tableau.
- En mars 2023, tout juste un mois aprÚs la sortie de l'ouvrage d'Elsa Mari et Ariane Riou, le gouvernement a dévoilé les conclusions de ses travaux pour réguler l'activité des influenceurs en France. Parmi les premiÚres décisions qui ont été annoncées se trouve l'interdiction de faire la publicité de la chirurgie esthétique sur les réseaux sociaux, votée en juin 2023. « C'est vraiment une belle avancée qui résulte d'une vraie prise de conscience », se félicite Elsa Mari.
- En amont, les deux autrices avaient été contactées par le cabinet de Bruno Le Maire pour discuter de leur travail et plus précisément de la responsabilité des influenceurs dans le recours croissant à la chirurgie esthétique chez les jeunes.
- Le livre a fait l'objet d'un écho retentissant. Il a été repris dans de trÚs nombreux médias (Quotidien, C à vous, Ouest France, Livre hebdo...).
- Les deux autrices ont accepté de répondre à plus de 70 interviews. « On a fait tout ce qu'on a pu pour relayer notre message, l'objectif était vraiment d'aboutir à une prise de conscience », détaille Elsa Mari.
- Les autrices ont eu énormément de retour de lectrices. Elles ont notamment reçu le témoignages de parents qui « se sentaient dépassés » et à qui la lecture de leur ouvrage a donné un nouvel éclairage.
- En mars 2023, un mois aprĂšs la parution du livre, 200 chirurgiens esthĂ©tiques ont publiĂ© une tribune dans Le Parisien pour demander que l'acide hyaluronique (utilisĂ© pour les injections) ne soit plus en vente libre. « Actuellement, on est face Ă un paradoxe, prĂ©cise Elsa Mari. Seuls les mĂ©decins ont le droit de faire des injections, alors mĂȘme que tout le monde peut acheter de l'acide hyaluronique en pharmacie. C'est comme ça que les fausses injectrices peuvent exercer. » Pour l'heure, aucun dĂ©cret n'est encore paru pour interdire l'interdiction de l'acide hyaluronique en vente libre.
- En septembre 2023, deux sĆurs ont Ă©tĂ© jugĂ©es devant le tribunal correctionnel de Valenciennes pour avoir rĂ©alisĂ© des centaines d'injection de botox alors qu'elles n'Ă©taient pas mĂ©decins et que certains patients ont Ă©tĂ© dĂ©figurĂ©s. Les deux sĆurs ont Ă©tĂ© condamnĂ©es Ă des peines de prison.
- De façon gĂ©nĂ©rale, d'aprĂšs Elsa Mari, il y a aujourd'hui beaucoup moins de « fake injectors » en activitĂ©. « AprĂšs la parution du livre, mĂȘme si ce n'est pas uniquement grĂące Ă nous, il y a eu une vigilance accrue envers les fausses injectrices, dĂ©taille Elsa Mari. La police judiciaire et la rĂ©pression fraude y ont portĂ© une attention particuliĂšre », dĂ©taille-t-elle.
Les coulisses de l'enquĂȘte đ”ïžââïž
Elsa Mari et Ariane Riou sont toutes deux journalistes au Parisien. Elles ont enquĂȘtĂ© ensemble pendant un an avant de publier leur ouvrage GĂ©nĂ©ration Bistouri. EnquĂȘte sur les ravages de la chirurgie esthĂ©tique chez les jeunes (Ă©ditions JC LattĂšs). Elsa Mari revient pour Rembobine sur la difficultĂ© de recueillir la parole des jeunes ayant eu recours Ă la chirurgie esthĂ©tique, le rĂŽle des rĂ©seaux sociaux et la responsabilitĂ© de certains mĂ©decins.
... Pour lire l'interview đ
CĂ©cile Massin
Comment mieux suivre le sujet ? đ§°
La lecture du livre d'Elsa Mari et Ariane Riou devrait vous occuper un petit moment, mais pour celles et ceux qui en redemanderaient, on vous conseille le trÚs bon documentaire Arte La folie de la chirurgie esthétique. Grùce aux témoignages éclairants de praticiens en France et au Brésil, ainsi que celui de la philosophe britannique Heather Widdows, il devrait vous permettre de prolonger vos réflexions.
On vous conseille Ă©galement le podcast Miroir Miroir de la journaliste Jennifer Padjemi pour Binge Audio. Dans l'Ă©pisode Faire face aux diktats de la beautĂ©, la journaliste donne la parole Ă sa consĆur Mona Chollet pour discuter des standards de beautĂ© fĂ©minins, ainsi que du rĂŽle jouĂ© par l'industrie de la mode, la chirurgie esthĂ©tique ou encore Internet.
Enfin, le passionnant épisode du Code a changé de Xavier de la Porte sur France Inter à propos de la "beauty", le petit secret du cinéma. Il propose une passionnante réflexion sur l'exploitation au cinéma de l'IA pour garantir une peau éternellement lisse aux actrices, sans recours à la chirurgie... Patriarcat, technologie qui renforcent les stéréotypes, c'est à écouter !
Lecteurs, citoyens...Vous avez le pouvoir de renforcer l'impact du travail des journalistes !
1. Partager l'enquĂȘte et l'Ă©tude de son impact par Rembobine Ă vos proches et sur vos rĂ©seaux đ
2. Essayer les filtres que propose Instagram ou Snapchat pour comprendre le phĂ©nomĂšne đȘ
3. Parler du sujet de la chirurgie autour de vous pour faire tomber le tabou, notamment auprĂšs des jeunes et des parents đŁ
Sur ce, on vous dit Ă la semaine prochaine pour le retour de Rembobine dans vos boĂźtes mails ! D'ici lĂ , si vous aimez cette newsletter, n'hĂ©sitez pas Ă nous faire un retour par mail ou sur les rĂ©seaux sociaux. Sinon, transmettez-la Ă unâąe amiâąe et n'hĂ©sitez pas Ă en parler autour de vous ! C'est pour le moment le meilleur moyen de nous soutenir ! đ
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