Soral et son business de la haine
Le polémiste d'extrême-droite continue d'avoir un rôle central dans la fachosphère et s'immisce toujours plus dans toutes les franges de la complosphère. Heureusement, un média d'investigation indépendant veille au grain sur les agissements de la galaxie Soral : StreetPress.
Alors qu'il caracolait sur YouTube avec ses vidéos au tournant des années 2010, cumulant jusqu'à 120 millions de vues avant que sa chaîne ne soit désactivée de la plateforme en 2021, Alain Soral semblait avoir un peu disparu des radars. Il n'en est rien. Le polémiste d'extrême droite continue d'avoir un rôle central dans la fachosphère et s'immisce toujours plus dans toutes les franges de la complosphère, surfant sur les fake news transphobes ou le mouvement antivax. Heureusement, un média d'investigation indépendant veille au grain sur les agissements de la galaxie Soral : StreetPress.
Soral Leaks, une plongée dans les comptes bancaires de la galaxie Soral
En mars 2023, les journalistes Mathieu Molard, Pierre Plottu et Maxime Macé publient sur StreetPress un reportage qui ausculte les comptes et les connexions entre plusieurs sociétés et associations gérées par Alain Soral et son bras droit Julien Limes.
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Retrouvez l'intégralité de l'enquête de StreetPress ⏫
Alain Soral, 65 ans, est un idéologue d’extrême droite, qui défend des idées antisémites, négationnistes, conspirationnistes, sexistes, masculinistes et homophobes (oui, tout ça...). Il est devenu, avec son ami Dieudonné, une figure majeure de l’extrême droite française « rouge-brun » et européenne. Son association « Égalité & Réconciliation » (E&R) structure le mouvement. Son site enregistre plusieurs millions de visites chaque mois. Ses vidéos et discours mensuels sont vus et entendus parfois par des centaines de milliers de personnes. Il a été condamné à une vingtaine de reprises, notamment pour provocation à la haine et contestation de crime contre l'humanité.
L'enquête montre que l'association Égalité & Réconciliation (E&R) a évidemment servi de vitrine afin de promouvoir l'idéologie soralienne, mais surtout à développer un juteux business à travers des boutiques, des marques et une maison d'édition. "Au bon Sens" (magasin bio), “Instinct de Survie" (boutique survivaliste à la mode à l'extrême droite) ou "Kontre Kulture", la maison d'édition qui lui sert à diffuser ses ouvrages, font partie de la galaxie décortiquée par l'enquête.
L'entreprise "Culture pour tous", dont Soral détient 80%, est le coeur de ses multiples activités commerciales. Créée en 2011, elle a fait du polémiste un millionnaire. Les revenus d'Alain Soral proviennent d'un cumul de salaires, de droits d'auteur, et de virements depuis des comptes suisses. L'article soulève des questions sur la nature des activités financières de Soral, mettant en lumière l'opacité et les ramifications financières de son empire commercial.
Crée en 2011, StreetPress documente les agissements de l'extrême droite et le cas Soral depuis son lancement. Sa rédaction compte de nombreux spécialistes du sujet, à l’image de Mathieu Molard et Robin d’Angelo (parti au Monde), qui ont écrit ensemble Le système Soral, enquête sur un facho-business aux éditions Calmann-Levy, ou encore Pierre Plottu et Maxime Macé (passé à Libération), auteurs de plusieurs des articles de ces “leaks”. Les papiers de Streetpress montrent comment Alain Soral a conservé une très forte influence sur les milieux conspirationnistes en France et surfe tour à tour sur la vague anti-vaccin ou même les polémiques absurdes sur Brigitte Macron. Lors de la crise sanitaire, Soral a aussi noyauté le mouvement antivax et s’est ainsi replacé au centre du jeu. Les “leaks” ont permis de montrer que Le média en 4-4-2, nouveau média de la complosphère en vue lors de la pandémie, était tenu par Christophe J., fidèle du polémiste, et rémunéré depuis plusieurs années par E&R ainsi que Culture pour tous, l’association et l’entreprise dirigées par Soral.
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Enfin, ces “leaks” ont aussi permis de documenter « l’affaire » Jean-Michel Trogneux, censée prouver que Brigitte Macron est un homme. Une fake news transpirant la transphobie qui a été reprise – et continue à l'être – par les sphères complotistes. Elle a éclaté dans Faits & Documents, la lettre confidentielle du journaliste d’extrême droite Emmanuel Ratier, reprise par Égalité et Réconciliation. Documents financiers en main, StreetPress a remonté le fil pour trouver qui en était à l’origine jusqu’à tomber sur des très proches de Marine Le Pen.
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Les "leaks" sur Soral ont-ils eu des conséquences ?
Un an après la publication de dernier volet des Soral Leaks, ont-ils été repris par d'autres médias ? La galaxie Soral a-t-elle été inquiétée par la justice ?
Rembobine vous propose de découvrir l'impact de l'enquête, d'après une méthodologie inspirée du média d'investigation Disclose et de son rapport d'impact.
- L'Assemblée nationale a adopté en première lecture, ce mercredi 6 mars 2024, une proposition de loi des députés Renaissance Mathieu Lefèvre et Caroline Yadan visant à “renforcer la réponse pénale contre les infractions à caractère raciste, antisémite ou discriminatoire”.
- Le vendredi 8 mars 2024, Emmanuel Macron est revenu pour la première fois sur les fausses informations qui prétendent que Brigitte Macron serait une femme transgenre. Il a dénoncé un machisme contre lequel « il faut utiliser le droit, la justice ».
- “Sur le volet économique de l'affaire, c’est tout au plus de la petite fraude de PME qui permet à Alain Soral et consorts de vivre. Pas de quoi ouvrir une enquête du parquet national financier”, explique Mathieu Molard.
- Les auteurs de l'enquête n'ont pas été interrogés en qualité de témoin sur la plainte pour diffamation de Brigitte Macron.
- Les différents articles ont eu quelques reprises par des personnalités publiques mais très peu dans la presse. Dernièrement, Numerama a repris le débunkage de StreetPress car la fake news sur Brigitte Macron a traversé l'Atlantique.
- L'enquête de StreetPress sur l'incursion de la galaxie Soral dans la complosphère antivax a permis de révéler au grand public que Le média en 4-4-2 est tenu par un fidèle du polémiste.
- Le site Conspiracy Watch a mentionné l’article sur les comptes bancaires d’Alain Soral dans sa newsletter d'avril 2023.
- Sur le site d'E&R, StreetPress a eu le droit à une réponse. L'auteur anonyme de l'article accuse Mathieu Molard de "vivre sur le dos d’Alain" et de "lutter pour le maintien de l’oligarchie en place".
- Le 4 juillet 2023, Mathieu Molard a participé à une journée d’échange avec une quarantaine de représentant·es d’associations et de syndicats invité·es par l'association VoxPublic pour parler des menaces et attaques émanant de l’extrême droite contre leurs organisations.
Les coulisses de l'enquête sur les "Soral leaks"
Mathieu Molard, rédacteur-en-chef de StreetPress et auteur, avec Pierre Plottu et Maxime Macé, de la dernière salve des Soral Leaks a accepté de revenir pour Rembobine sur l'impact relativement limité de ces papiers sur la galaxie Soral. Il raconte la nécessité de documenter au long court l'influence du polémiste, mais aussi la difficulté de donner de l'écho à des enquêtes détaillant des flux financiers
... Pour lire l'interview 👇
Timothée Vinchon
Extrême droite et “complosphère” : comment mieux suivre le sujet ?
FAF, l’une des newsletters de Streetpress, ausculte chaque mois la mouvance de l'extrême droite sous toutes ses coutures. Des identitaires obsédés du grand remplacement, des nationaux révolutionnaires violents, des cadavres dans le placard du RN, ces révélations plus surprenantes les unes que les autres décrivent pourtant une réalité dans le pays.
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Chez Libération, vous pouvez lire Frontal, la newsletter hebdomadaire de leur cellule de journalistes spécialisés dans le traitement de l'extrême droite. Enquêtes, portraits, reportages et suivi des actions et groupes violents… Vous serez incollables sur le sujet.
Très suivi sur les réseaux sociaux, comme le prouve ses 46 000 abonnées sur X (anciennement Twitter), l'Extracteur est un collectif informant sur les dangers de certaines pseudo-alternatives en matière de santé et d’alimentation et alertant sur les dérives sectaires. Il a récemment publié une cartographie des réseaux d’influence entre extrême droite et ce qu’il appelle la “complosphère”.
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